Il a réalisé le portrait de célébrités comme Amy Winehouse, Mylène Farmer, Iggy Pop, Stromae, Françoise Hardy, Robbie Williams, Leonard Cohen, Depeche Mode, Radiohead... Mais, depuis une quinzaine d'années, Robin a choisi de mettre également ses talents de photographe au service d'anonymes croisés dans la rue, les commerces de son quartier ou les concerts. Et le résultat est tout simplement saisissant de beauté et de naturel.
Après Arles, il présente à Paris, "Masculinité(s) - Saint Sébastien, le corps triomphant". Des clichés de modèles illustrant le martyr qui aurait miraculeusement délivré Rome de la peste noire. Après sa mort, il est ainsi devenu le protecteur invoqué pour lutter contre les épidémies.
Une manière aussi, pour le photographe, de mettre en lumière l'importance de la prévention.
- A quel moment avez-vous décidé d'abandonner les stars au profit d'inconnus ?
Je ne les ai pas abandonnées ! Mais je fais ce métier depuis 30 ans et j'avais envie d'élargir mon travail en m'intéressant à des gens qui n'ont pas l'habitude de poser devant un objectif.
- Vous avez dû essuyer de nombreux refus lorsque vous leur avez demandé de poser torse nu ?
En fait, à part un touriste qui repartait le jour même, tous ceux à qui j'ai proposé de poser pour moi ont accepté. Je suis le premier surpris car, personnellement, je suis quelqu'un de très pudique. L'idée d'aller à la piscine est une torture pour moi ! Mais tout s'est déroulé le plus naturellement du monde. Je travaille avec certains modèles depuis une quinzaine d'années. Nous avons tissé des liens de confiance et d'amitié. Je suis même le parrain de la fille de l'un d'entre eux !
- Parlez-vous de ce garçon qui semble tout droit sorti d'un cabaret expressionniste allemand des années 30 ?
Je l'ai rencontré dans un fast-food ! J'ai d'autres photos de lui car il a un regard incroyable. J'ai eu le sentiment qu'il avait accepté de venir pour me rendre service car il n'aime pas son corps et n'a aucune conscience de ce qu'il peut dégager.
- La photographie fonctionne comme un révélateur ?
J'ai vu des modèles fondre en larmes parce qu'ils ne savaient pas qu'ils étaient beaux ! Du coup, ils retrouvent une certaine confiance et une estime de soi. Ce qui est surprenant aussi c'est que lorsque je parle du Caravage, de photographie, de Saint Sébastien, certains commencent à s'intéresser à l'histoire de l'art. J'ai même reçu des cartes postales de vacances avec la photo du martyr car il est représenté un peu partout dans le monde.
- On pourrait dire la même chose de vos clichés, notamment celui d'Amy Winehouse ?
C'est un peu exagéré d'affirmer ça car je ne suis pas très à l'aise pour parler de mon travail. Mais c'est vrai que j'ai eu la surprise de découvrir le portrait que j'avais fait d'elle, en pochoir, sur un mur à Sao Paulo.
- Cette exposition a un autre objectif, non ?
Saint Sébastien symbolise la lutte contre la peste et, par extension, j'ai voulu mettre l'accent sur les virus d'aujourd'hui comme le sida, la Covid-19... et sensibiliser les gens en matière de prévention. Sur les photos, on ne voit plus les flèches qui traversaient le corps du martyr car ces nouveaux fléaux sont invisibles. Une autre facette de l'exposition est le concept "Parfum Imaginaire" proposant des photos clefs en main pour des campagnes publicitaires.
- Vous avez d'autres projets ?
J'ai réalisé la photo de la pochette de l'album de Daniel Auteuil et celle de Blankass. Et je ne peux pas encore vous dire son nom mais je suis en discussion avec un artiste pour le suivre en tournée. Je dois également aller au Festival des Vieilles Charrues pour monter une exposition de photos avec les artistes et les spectateurs. Il y a aussi un conservateur de musée qui semble intéressé pour une présentation des clichés dans plusieurs villes en France et en Europe.
- Vous avez des anecdotes concernant les artistes que vous avez rencontrés ?
J'ai davantage de souvenirs avec les anglo-saxons car ils accordent leur confiance d'emblée. Les français ont un rapport plus complexe à l'image. Lorsque j'ai vu Amy Winehouse, la première fois, elle était très simple et disponible. Même chose avec Iggy Pop.Il était à Paris pour un live et il m'a gardé toute la semaine avec lui. Il m'a même demandé d'accompagner son fils à la Loco. J'apprécie aussi beaucoup Depeche Mode avec qui j'ai passé de longues heures à parler de la vie... et de la mort. J'ai appris que leur nouvel album s'appelait "Memento Mori". Je me souviens aussi de Damon Albarn ( Blur), qui m'a simplement accueilli en me disant: "si tu es encore là, c'est que tu es bon".
- Jusqu'au 29 mars 2023, à La Maison des Photographes, 10, rue de Belzunce, 75010 Paris.
- site du photographe: http://www.robin-photo.com
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