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Bévinda: "La saudade est une délicieuse nostalgie qui se savoure"

  • Photo du rédacteur: GRANDJANIN Annie
    GRANDJANIN Annie
  • il y a 5 minutes
  • 3 min de lecture


(c) Marc Melki
(c) Marc Melki

Au fil d'albums comme "Fatum", "Terra e ar", "Alegria", "Lusitânia"... l'artiste d'origine portugaise, installée en France depuis de longues années, n'a cessé d'explorer la musique de son pays en y apportant une touche contemporaine reflétant sa propre sensibilité. Mais son inspiration puise également dans la chanson française, la poésie de Fernando Pessoa, la world ou le jazz. On se souvient du bel hommage "Serge Gainsbourg tel qu'elle" où elle revisitait quelques titres jazzy des années 60.

Après un long silence discographique, Bévinda a enregistré "Gêmeos", où elle évoque notamment son jumeau Manuel, disparu quelques jours après sa naissance. Une ode à la fois émouvante et lumineuse au lien fraternel et à la mémoire de ceux qui vivent toujours avec nous.

Rencontre avant son concert parisien, le 18 juin prochain, au Studio de l'Ermitage.


-On a souvent l'image des chanteuses de fado, les yeux fermés, portant invariablement des vêtements noirs ?

Il y a bien longtemps que je ne m'habille plus en noir ! De toute manière, je ne suis pas vraiment "répertoriée" dans le fado. J'ai toujours été considérée à part. Je me fais égoïstement plaisir. J'ai une technique lyrique derrière moi. A une certaine époque, je chantais des lieds de Mozart ! Quand on écoute le fado dans la voix d'Amalia Rodrigues, il n'est pas seulement triste.J'aime bien dire que la saudade est une délicieuse nostalgie qui se savoure. Elle ne donne pas forcément envie de se jeter par la fenêtre ! Pour moi, c'est une sorte de blues maritime.

-Pourquoi maritime ?

J'avais lu l'histoire de ce roi qui avait quitté le Portugal pour s'exiler au Brésil avec sa cour et ses serviteurs. Ils chantaient et dansaient ensemble. Le fado serait né là-bas et aurait été rapporté par les marins dans le port et les quartiers populaires de Lisbonne. C'est une musique de l'exil qui permet d'explorer nos sentiments les plus intimes. La chanson sert aussi à ça: raconter des choses qu'on ne dirait pas autrement.

-Vous avez aussi chanté les mots de votre mère ?

Ma mère était une intellectuelle contrariée. Une femme dans la tradition, avec une force intérieure incroyable. Quand elle s'est retrouvée seule, elle s'est mise à lire de façon boulimique. Pour mon premier album, elle m'a tendu un petit cahier et j'y ai puisé le texte de "O jardim". Elle a aussi écrit "Amadeu" sur mon père. Lorsque je lisais ses textes, je découvrais aussi la femme. Elle m'a laissé un cahier dans lequel elle raconte son voyage en train pour la France, avec ses trois enfants. J'aimerais en faire quelque chose, un jour. En attendant, je suis comme Pessoa, je garde tout dans une malle !




-Votre rencontre avec Gilbert Castro qui a notamment découvert Cesaria Evora a été déterminante dans votre carrière ?

C'est vrai, c'était en 1993. Il a produit tous mes albums sauf "Luz" et "Gêmeos".

-Il paraît que vous avez aussi chanté Edith Piaf ?

J'avais été contactée par un tourneur qui avait travaillé à RFI et avait ouvert un théâtre dans une église à Lisbonne. Il souhaitait que je reprenne des chansons de Piaf. J'ai adoré ça. Nous avons fait quelques dates en tournée avec ce projet.

-Pourquoi ce long silence avant d'enregistrer "Gêmeos" ?

Je n'arrivais plus à écrire. J'étais à la campagne et, pendant dix ans, je me sentais comme en jachère. Je n'avais que huit ou dix ans lorsque j'ai appris que j'avais eu un frère jumeau, disparu alors qu'il avait tout juste 15 jours. J'ai beaucoup questionné ma mère à l'époque, puis j'ai enfoui tout cela. Un jour, j'ai eu l'impression d'entendre ce frère me demander pourquoi je ne lui écrivais pas une chanson. Et les mots sont venus...

Propos recueillis par Annie Grandjanin


-Album "Gêmeos", disponible depuis le 29 février 2024.

-En concert le 18 juin 2025, à 20h30, au Studio de l'Ermitage, 8 rue de l'Ermitage, 75020 Paris. Loc. points de vente habituels et sur le site www.studio-ermitage.com

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