En 2022, le public du Petit Montparnasse à Paris, avait réservé un véritable triomphe à la pièce "Glenn, naissance d'un prodige", écrite et mise en scène par Ivan Calbérac, couronnée l'année suivante par deux Molières dans les catégories "Révélation féminine" pour Lison Pennec et "Révélation masculine" pour Thomas Gendronneau. Il semblait donc légitime que cette histoire évoquant le destin exceptionnel et tragique du pianiste canadien Glenn Gould, revienne cette fois dans la grande salle du Théâtre Montparnasse !
"C'est l'histoire d'une mère qui fait reposer sur son fils tous les rêves qu'elle n'a pas pu réaliser elle-même. C'est l'histoire d'une demoiselle qui tombe éperdument amoureuse d'un garçon qui lui joue trop bien du piano, garçon que la célébrité va rendre de plus en plus désirable, mais aussi, hélas, de plus en plus inaccessible. C'est l'histoire d'un artiste inclassable, aussi libre dans son art qu'il était prisonnier au quotidien de ses insomnies, de ses phobies sociales, de son hypocondrie..." confie l'auteur.
On pourrait se contenter de ce résumé, mais le spectacle va bien au-delà. Il interroge aussi sur le rôle de l'artiste et de la création, les méfaits de l'amour castrateur, la solitude...
On connaît la vie de ce génie, considéré comme l'un des plus grands du XXème siècle, dont les ventes de disques n'avaient rien à envier à celles d'une rock star. Mais "Glenn, naissance d'un prodige" nous emmène également, avec un impeccable tempo, dans les pas de l'enfant enfermé dans les toilettes jusqu'à ce qu'il maîtrise les dictées de notes imposées par sa mère, de l'adolescent charismatique, du musicien qui imposera son interprétation des "Variations Goldberg" de Bach pour son premier enregistrement, de l'homme torturé par la pression des concerts qui, en pleine gloire, renoncera à se produire en public.
Un personnage fascinant et déconcertant, incarné par Thomas Gendronneau (en alternance avec Nicolas Avinée). Et on peut véritablement parler d'incarnation tant le comédien-musicien se glisse avec virtuosité dans le rôle. Etrangement penché sur le piano, juché sur une chaise reproduisant le modèle fabriqué par le père de Glenn Gould, il offre l'image d'un homme transcendé par son art. Et il est tout aussi convaincant lorsqu'il cède aux angoisses et aux caprices d'un artiste dont on disait qu'il souffrait du syndrome d'Asperger. Dans une atmosphère rappelant celle des tableaux d'Edward Hopper, on assiste aussi à des séquences franchement cocasses comme celle du talk-show opposant la mère (Josiane Stoléru ou Raphaëline Goupilleau) et le fils dans les studios de Radio Canada ou l'initiation maladroite au fameux "french kiss" avec sa tendre et pétillante cousine (Lison Pennec ou Agnès Claverie).
Le reste du casting est au diapason avec Bernard Malaka ou Julien Rochefort dans le rôle du père effacé et bienveillant, Stéphane Roux ou Stéphane Ronchewski dans celui du journaliste ou encore Benoit Tachoires (en alternance avec Alban Aumard), dans le costume du débonnaire Impressario. Chacun joue parfaitement sa partition.
-A partir du 20 septembre 2024, du mardi au samedi à 19h, matinée le dimanche à 17h30, au Théâtre Montparnasse, 31, rue de la Gaîté, 75014 Paris. Loc. au 01.43.22.77.74. www.theatremontparnasse.com
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